par Gérald Cusin
En juillet 1992, le Cardinal Ratzinger – qui n’était pas encore pape – avait écrit aux évêques américains pour leur rappeler que les discriminations envers les homosexuels n’étaient pas injustes, et mêmes justifiées dans certains domaines (l’armée, l’éducation, la famille …). Il n’hésitait pas à affirmer qu’en demandant des droits, les gays et les lesbiennes encourageaient les violences homophobes : « Ni l’Eglise ni la société ne devraient être étonnées quand les réactions irrationnelles et violentes augmentent » … C’est bien connu : il n’y aurait pas de racisme, s’il n’y avait pas d’étrangers.
Le rejet de l’homosexualité, la persécution des homosexuels est un phénomène présent dans la plupart des religions.
Chez les bouddhistes, on ne trouve pas de texte condamnant l’homosexualité, l’essentiel étant de pratiquer une conduite sexuelle éthique, c’est-à-dire qui n’a pas pour conséquence la souffrance d’autrui ou de soi-même. Ce qui est accepté pour les laïcs, ne l’est en revanche pas pour les moines : « Si un moine pratique l’acte sexuel dans ce passage (sic), même si la pénétration ne dépasse pas la taille d’un grain de sésame, il est coupable de faute » (règles monastiques). Il semble que cette mise en garde soit d’ailleurs relativement récente, et la conséquence de certains « dérapages » monastiques : Les rapports liboudhadineux chez les bonzes sont donc prohibés.
Unanimité pour les religions du Livre
L’Islam, par contre, considère l’homosexualité comme un péché contre l’ordre établi par Dieu. La charia, appliquée aux homosexuels peut entraîner la peine de mort, comme en Arabie Saoudite. On compte également un certain nombre d’exécutions dans l’Afghanistan des Talibans. En Tunisie, en 2005, un Tunisien et un Français ont été condamnés à 6 mois de prison en vertu de l’article 230 du Code pénal. Mais, de nombreux poètes comme Abu Nuwas ou Omar Khayan ont chanté l’homosexualité, ou tout du moins le bisexuel. Bissexualité apparemment assez admise à l’époque du célèbre Harum-al-Rachid. Il semble bien en effet que la pédérastie même ait fait l’objet d’une grande faveur dans certaines cours califales. Au paradis d’Allah, il n’y a pas que des houris éternellement vierges et perpétuellement disponibles, il y a aussi de nombreux échansons et des éphèbes à l’éternelle jeunesse, ce qui fait un peu désordre, malgré tout, même si chaque élu peut ainsi y trouver son compte.
C’est dans la Bible, qu’on trouve les références originelles de l’aversion envers les homosexuels (dans la mesure où la référence explicite commune au Coran et à la Bible est la fameuse histoire de Lot). Dieu accorda à Abraham (Gen.19) la possibilité de sauver les villes de Sodome et Gomorrhe, à condition qu’il s’y trouva au moins dix justes. Il envoya des anges qui allèrent habiter chez Lot (neveu d’Abraham). Dans la nuit, toute la ville s’assemble devant la maison et demande à Lot de faire sortir les étrangers pour qu’ils les connaissent (au sens biblique, évidemment).
Loth refuse, parce que il a donné l’hospitalité. Il propose en échange deux de ses filles encore vierges.
Cette histoire se retrouve plus ou moins dans le récit du Lévite à Gulbea (Juges, 19). Même topo., mais le maître de maison propose également (un souci qui l’honore) en échange sa fille vierge et même la concubine de l’homme qu’il a reçu chez lui (la sacro-sainte loi de l’hospitalité est à géométrie variable).
Contre nature, avez vous dit ?
L’homosexualité est donc condamnée par le Dieu d’Abraham. Elle l’est également dans le christianisme. Même si les évangiles n’abordent pas le sujet, on trouve plusieurs textes attribués à Paul qui y font explicitement référence : (épître aux Corinthiens, épître à Thimotée… « Ne savez-vous pas que ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les efféminés, ni le pédérastes, ni les voleurs, ni les accapareurs, ni les ivrognes, ni les calomniateurs, ni les filous n’hériteront du royaume de Dieu ? (1Cor 6 :9-10) ». (Et bien !, ça en fait du monde à la porte)
Les homosexuels furent poursuivis, condamnés au bûcher à partir du IVème siècle, lorsque le christianisme (cette religion d’amour que tout l’Orient nous envie) devint religion d’Etat, et ce – en France – jusqu’en 1789, date à laquelle la Révolution française instaura la première séparation des Eglises et de l’Etat.
L’Eglise catholique d’aujourd’hui ne condamne pas les tendances homosexuelles, mais les actes (Persona Humana, 1976, Homosexualitatis Problema de J.P II en 1986 et dans le catéchisme de l’Eglise catholique de 1992). Les homosexuels sont appelés à vivre dans la chasteté, s’ils veulent se rapprocher « de la perfection chrétienne » (catéchisme) Au bout du bout, l’homosexualité est condamnée parce qu’anti-naturelle, contraire à la loi naturelle voulue par Dieu et par son dessein intelligent. Il semble bien que nos croyants aient encore une fois tout faux. C’est du moins ce que tend à prouver une exposition qui se déroule actuellement au musée d’Histoire Naturelle d’Oslo sur l’homosexualité animale. On n’y trouve pas que des photos de phoques : Du scarabée au cygne, en passant par le lion et le cachalot, ce sont plus de 1 500 espèces chez qui on a détecté des phénomènes d’homosexualité ou de bisexualité isolés, périodiques ou réguliers.
L’exposition s’intitule « Contre nature ? », et Geir Soeli, son organisateur, d’affirmer : « Les personnes homosexuelles étant souvent confrontées à l’argument selon lequel leur mode de vie va à l’encontre des principes de nature, nous pouvions montrer que ce n’est pas le cas. (…) On peut penser ce qu’on veut des homosexuels mais on ne peut pas utiliser cet argument parce que l’homosexualité est très naturelle et très répandue dans le royaume des animaux. »
Encore un nouveau recul du dogme. Ce qui n’est pas apprécié, notamment de certain pasteur de l’Église luthérienne qui a souhaité charitablement que les concepteurs de cette exposition « brûlent en enfer ». Un autre – de l’Église pentecôtiste – a considéré que « l’argent des contribuables aurait été plus utile à aider les animaux à corriger « leurs perversions et leurs déviances ». On ne peut que se réjouir du souci manifesté de l’argent public, même si ce saint-homme nous invite à commettre le péché d’orgueil en prétendant que nous serions capables de corriger la nature telle que Dieu l’a voulue.
Peut-être que le Dieu des armées enverra-t-il le feu purificateur détruire à jamais la capitale nordique ? Qu’on entame des neuvaines à ce sujet dans tous les couvents réguliers, pendant ce temps – au moins – les nonnes et les nonnains ne penseront pas à autre chose.